La plaine du Brusquet, vue de la piste qui grimpe vers le col de l’Escuchère ressemble ce matin à un immense lavabo rempli de détergent qui aurait trop moussé.
Le temps est au redoux persistant, la petite pluie fine de la nuit a terminé de lessiver les basses montagnes de leur pelade de neige.
Plus haut sur les hauteurs les crêtes exposées se dénudent comme la carcasse du mouflon méticuleusement nettoyé par le vautour fauve.
La longue piste qui serpente sonne mou sous les pieds.
On passe successivement devant le hameau des Ribauds, une décharge sauvage, quelques baignoires installées dans les pentes pour abreuver les animaux.
Arrivé au col, le lavabo plus bas s’est vidé silencieusement de son brouillard.
L’air est chaud dans le silence brisé d’un côté par les bruits des tronçonneuses et de l’autre par la rivière chargée de la fonte des neiges.
L’exercice de la marche qui consistait aujourd’hui à passer d’une vallée à une autre, permet aux pensées qui nous encombrent de pouvoir s’échapper en sueur.
On les cache alors volontiers sur les bas côtés des sentiers.
Sous un gros rocher de préférence.
Ou dans un trou de sanglier.
Il arrive souvent que l’esprit soit plein, comme le plan du Brusquet ce matin.
Alors on marche et souvent, le paysage autour participe à cette remise à zéro bénéfique.
On se changerait volontiers en caillou, en chevreuil, où même en oiseau blessé, comme celui qui sautille près de nous avec son aile tordue.
Certains jours on s’imagine même transformé en couche de neige, dans un endroit abrité au Nord pour passer l’hiver à ramasser au passage les poussières de vent et les confidences animales, diminuer lentement pour disparaître au printemps.
Mais pour l’instant on arrive à Esclangon.
Si il existe un endroit qui respire la laideur et l’ennui c’est bien ici.
Mercredi 26 Décembre 2012.