Le thermomètre indique deux degrés au dessus de zéro.
En ce matin de fin de Mai, une petite neige fine accompagne doucement le début de la marche dans ce paysage caractériel.
On a décidé malgré un temps à rester dedans d’aller courir le bois pour retrouver la piste qui grimpe au Fort de Dormillouse.
On se dit qu’hier fût pire alors on avance joyeusement dans le brouillard.
Passé le bois, il faut grimper plus sec, passer sous les télésièges en écoutant les bruits de la vallée sans la contempler.
D’habitude on vient ici pour la vue.
Aujourd’hui pas de chance, on ne voit pas à 10 m, il y a 20 cm de neige fraiche au sol et plus bas les moutons bêlent en broutant l’herbe verte.
La neige tombe plus fort.
On glisse parfois sur un caillou caché pour enfin arriver sur une piste large, tellement blanche qu’elle aveugle et désoriente facilement.
On suit les murs de protection dans des lacets qui sont sensés nous conduire vers le fort.
Il faut juste faire attention de ne point chuter sous la barre.
De gros rochers gris, dans le brouillard gris transmettent juste par leur présence fantôme une sorte de frisson dans le corps.
On imagine alors comme dans un rêve d’enfant, un combat à l’épée qui se déroulerait sur cette crête, un duel pour l’honneur, un seul gagnant, un seul cri dans le précipice.
Il faut se réveiller et reculer du bord, le vide est profond et on ne voit pas le fond.
Au détour d’un rocher la montagne n’a plus ses repères, tout est blanc, gris virant sur le noir, il neige dans un vent bruyant, le Fort n’est pas loin, certainement derrière la muraille blanche mais la limite à franchir demande une dose d’inconscience et dans le doute on préfère redescendre.
Le frisson s’est transformé en peur, du vide, du blanc, de l’espace qui a crée cette solitude effrayante.
Une chose est certaine, on reviendra pour la vue mais le mauvais temps donne sans aucun doute une ambiance mortifère qui sied à la marche en solitaire.
Mardi 22 Mai 2012.